Le « congé-éducation payé » (CEP) permet à un travailleur de suivre une formation pendant son temps de travail tout en conservant sa rémunération. En Wallonie et à Bruxelles, une réforme du CEP devrait bientôt voir le jour.
En Belgique, tout travailleur a le droit de suivre une formation agréée pendant son temps de travail, sans perdre sa rémunération. Toutefois, le CEP est un système dont la réglementation varie selon la Région. Dès la rentrée 2024-2025, des changements distincts devraient arriver en Région wallonne et en Région de Bruxelles-Capitale.
Le CEP est accessible aux travailleurs du secteur privé ainsi qu’à ceux de certaines entreprises publiques autonomes telles que la SNCB, BPost ou Proximus. Ces travailleurs peuvent alors suivre des formations agréées qui se distinguent en deux types : les formations générales et les formations professionnelles. Une corrélation entre l’emploi actuel et la formation n’est pas nécessaire. Ainsi, un travailleur peut se former à un métier totalement différent de celui qu’il exerce actuellement afin d’opérer la transition plus tard dans sa carrière.
Concernant la formation générale, seuls les travailleurs à temps plein, à temps partiel à hauteur d’un 4/5e minimum ou à temps partiel avec un horaire variable pourront y avoir recours. Les travailleurs à temps partiel avec un horaire fixe de moins de 4/5e et minimum à mi-temps n’ont pas accès aux formations générales. Les formations rofessionnelles
sont accessibles à tous. Pour les travailleurs à mi-temps ou à moins de 4/5e, il faut que la formation soit suivie pendant les heures de travail.
La formation devra être identifiée comme telle, et non comme un stage, une session d’information ou la découverte d’un métier. Enfin, elle devra être donnée par une structure dont l’activité principale est la formation. En Wallonie, la formation doit être agréée par le Service public de Wallonie. Les formations organisées par les organisations représentatives des travailleurs, par exemple la CGSLB, sont automatiquement reconnues comment formations générales et donnent droit à 80 heures de formation par année scolaire. Le travailleur peut ensuite suivre les cours durant ses heures de travail ou en-dehors de celles-ci.
Combien d’heures puis-je me former ?
Chaque formation doit durer au minimum 32 heures, avec un maximum de 100 heures pour les formations professionnelles si la formation ne coïncide pas avec les heures de travail (120 heures si elle coïncide avec les heures de travail). Les formations générales sont limitées à 80 heures par année académique pour les travailleurs à temps plein. Pour les travailleurs à temps partiel, le nombre maximum d’heures est calculé au prorata de leur temps de travail hebdomadaire. Ces plafonds peuvent être majorés si la formation concerne un métier en pénurie, si le travailleur est peu qualifié (pas en possession du CESS) ou âgé (50 ans et + au moment du premier jour de la formation).
Il faut ensuite calculer le nombre d’heures de présence aux cours (des attestations sont remises par les organisations), ce qui correspond au nombre d’heures qui seront remboursées à l’employeur. En Wallonie, l’employeur reçoit 21,30 euros par heure de congé-éducation payé. Le travailleur, quant à lui, continue d’être rémunéré par son employeur,
avec une certaine limite. Pour l’année scolaire 2022/2023, celle-ci s’élevait à 3.170 euros bruts du 1er septembre 2022 jusqu’au
1er janvier 2023 jusqu’au 31 août 2023. Normalement, un travailleur ne peut se voir refuser un congé-éducation payé, mais l’employeur peut établir au préalable un planning en fonction de l’effectif actuel afin que tous les travailleurs ne soient pas absents en même temps. À noter également qu’un travailleur est protégé contre le licenciement à partir du moment où il introduit sa demande de congé-éducation payé, et ce jusqu’au terme de sa formation. Il ne peut pas être licencié pour ce motif mais peut toujours l’être pour d’autres, dont l’employeur doit prouver l’existence.
Quels documents devez-vous remettre ?
Si vous suivez une formation Fast durant l’année académique 2023-2024, vous recevez deux exemplaires de l’attestation d’inscription CEP. L’un d’eux est à remettre à votre employeur. Á la fin de chaque trimestre, vous recevez également une attestation de présence qui indique le nombre d’heures de présence, d’absence justifiée ou injustifiée. Attention,
si le nombre d’heures d’absences injustifiées est supérieur à 10% du nombre total d’heures, votre droit au CEP sera suspendu dès le premier jour du trimestre suivant. Si vous fournissez un justificatif d’absence valable, une nouvelle attestation de présence pourra être fournie, avec les absences injustifiées converties en absences justifiées. Les attestations de présence sont également à remettre à l’employeur.
Réforme en cours
Le système de CEP devrait subir quelques changements en Wallonie. À l’heure d’écrire ces lignes, le Gouvernement wallon semble attendre l’avis du CESEW (où siège la CGSLB)
pour présenter officiellement ces changements. En juillet dernier, un avant-projet de décret a été adopté en première lecture. Voici ses principaux points :
- le CEP est recentré sur la convention n°140 de l’OIT, laquelle consacre le droit à la formation des travailleurs ;
- assouplissement des conditions d’accès pour les travailleurs à temps partiels (calcul du nombre de jours compensés par le CEP au prorata du régime de travail figurant au contrat de travail au jour de l’inscription) ;
- le plafond d’heures annuel octroyé de CEP sera uniformisé et fixé à 120 heures (pour les formations générales comme professionnelles), avec une majoration de 60 heures pour les travailleurs peu qualifiés, âgés, ou qui bénéficient d’une reconnaissance de l’Agence wallonne pour une vie de qualité afin de favoriser la participation de ces publics aux dispositifs de formation où ils sont sous-représentés ;
- le montant du remboursement aux employeurs passera de 21,3 euros à 25 euros par heure de CEP par travailleur ;
- mise en place d’une bourse de 500 euros par année académique, prévue dans le Plan de Relance wallon, c’est-à-dire au moins jusqu’à la rentrée de septembre 2027 ;
- introduction d’une nouvelle procédure d’agrément pour éviter les dérives dans le cas des formations sectorielles.
Concernant la Région de Bruxelles-Capitale, un arrêté publié le 21 août dernier apporte quelques changements au CEP dès la rentrée 2023-2024 :
- l’accès au CEP est simplifié et étendu aux travailleurs à temps partiel, à conditions qu’ils soient occupés au minimum à 25% d’un temps plein ;
- élargissement du nombre de formations reconnues ;
- le plafond d’heures de formations a été augmenté à 130 heures par an pour les travailleurs peu qualifiés, pour certaines formations en langue, pour les formations permettant l’acquisition de compétences numériques de base. Le nombre maximum d’heures est fixé à 120 heures 120 heures pour les formations professionnelles et les formations professionnelles et générales, à l’exception des formations linguistiques, suivies au cours de la même année indépendamment du fait que les heures de cours coïncident avec le temps de travail du travailleur ;
- le montant du remboursement sera limité à 700.000 euros par employeur et par année civile.
À la CGSLB, nous estimons que le plafond de 120 heures est trop faible pour un travailleur qui souhaite réellement se former dans son métier ou se réorienter. De plus, avec des formations de 32 heures, il est impossible de remplir ces 120 heures annuelles, cela génère forcément des pertes. Il faudrait alors soit réduire le nombre d’heures minimum par formation (par exemple à 24 heures pour pouvoir en prendre 5 par an) ou augmenter le nombre d’heures par année académique. Nous déplorons également la disparition dans l’avant-projet de décret de la majoration du plafond d’heures maximum pour les formations vers des métiers en pénurie, alors que de nombreux secteurs souffrent encore d’un manque de personnel et de difficultés à recruter. Enfin, il faudrait uniformiser certaines règles dans les trois Régions et la communauté germanophone afin qu’il soit plus simple d’avoir recours au CEP (VOV en Flandre). Par exemple, cela ne devrait pas poser de problème pour un travailleur francophone travaillant en Flandre de suivre des formations en Wallonie. (Remarque : le régime de libération CEP ou VOV dépend du lieu de travail et non pas du lieu de formation).
La bourse visant à inciter les travailleurs à se former est en revanche une bonne initiative, car le marché du travail évolue de plus en plus rapidement, et il faut évidemment que les travailleurs s’adaptent constamment, tout au long de leur carrière. Mais ils doivent pouvoir le faire dans des conditions optimales et sans le moindre obstacle.